• L’Ascension de Jésus : la fête du triomphe du Christ ressuscité

    L’Ascension de Jésus : la fête du triomphe du Christ ressuscité

     

     

     

    Aujourd’hui, Jeudi 9 mai, nous célébrons le Jeudi de l’Ascension. J’écris cet article afin de vous souhaitez à toutes et à tous un très bon Jeudi de l’Ascension ! Et aussi pour vous faire découvrir cette fête qui se déroule quarante jours après le dimanche Pâques.

     

    Cette fête est basé sur un récit qui est l'œuvre de l'évangéliste Luc et qui l'on retrouve dans Luc 24, 50-53 et Actes 1, 9-12 dans des contextes et des lieux différents. Peut-être a-t-il repris une tradition d'une apparition de Jésus sur une montagne, commune à celle de Matthieu 28, 16-20, où Jésus envoyait ses disciples en mission, mais sans élévation de Jésus. Mais les deux récits de Luc gardent cependant toujours avec la même signification. L'évangéliste veut montrer à sa communauté probablement composé en majorité de sympathisants du Judaïsme et de Païens convertis que par sa résurrection des morts, Jésus a été exalté, et ainsi devenu le nouveau roi de ce monde. Tout comme les empereurs, Jésus connaît ainsi une apothéose mais sans divinisation après sa mort. En effet, contrairement aux empereurs, il sera appelé à régner de nouveau puisqu'il reviendra au Jour de Yahvé – avec qui il siège à sa droite, la place d'honneur à côté du trône –, pour juger les vivants et les morts et libérer les peuples de la domination oppressive de Rome. Un vrai petit brulot politique encore plus réaffirmé lorsque l'on sait que Jésus y est comparé à Élie, un célèbre prophète du IXe siècle av. J. – C. qui combattit le roi d'Israël Achab (874-853 av. J. – C.) et sa femme la Phénicienne, Jézabel, qui dans le récit du livre des Rois, veulent acculturer leur pays en  en imitant les nations voisines, la Phénicie et l'Égypte, et en introduisant leurs dieux, dont le Baal de Tyr, Melqart. Tout comme Jésus qui en proposant l'empire (basileia) de Dieu entendait combattre l'hellénisation à marche forcée par le gouverneur romain de Judée, Ponce Pilate, et ses collaborateurs de la Judée du Ier siècle, Hérode Antipas et les grands prêtres.

     

    Cette identification est du tout sauf au hasard puisqu'Élie, lui-même, a été enlevé au Ciel comme Jésus sans connaître toutefois la mort et c'est son disciple Élisée qui a fait chuter la dynastie d'Omri pour la remplacer par celle de Jéhu. Jésus fait de même dans ce récit où il prépare auparavant ses 120 disciples, dirigé par Simon Pierre et les Douze, ses frères, et les femmes, à gouverner Israël, les encourageant à retourner à Jérusalem. Les disciples de Jésus pensaient d'ailleurs qu'il reviendrait de leur vivant et mettrait fin à la domination romaine. Les épîtres de Paul ne le montre que trop bien.  La croyance à l'ascension des Justes avait aussi un caractère des plus politiques car elle a été très prégnante à partir du IIe siècle av. J.-C. lorsque les Maccabées luttèrent contre les rois Séleucides pour combattre l'acculturation grecque de leur culture juive et de Jérusalem avec son lot de martyrs. Et elle s'appuyait sur des livres apocalyptiques, tels le livre d'Hénoch, dont les parties les plus anciennes remontent à la première moitié du IIe siècle av. J. – C., marqués par leur défense de la culture juive contre cette acculturation.

     

    De plus, dans les deux récits de Luc, c'est tout sauf une séparation, c'est un envoi en mission par Jésus de ses disciples afin de créer un mouvement de résistance à l'intérieur de l'empire romain d'abord à Israël pour vaincre par la résistance passive la violence de l'empire romain et faire advenir le retour glorieux de Jésus qui établira l'empire de Dieu. Il est assez étonnant que la censure romaine des Ier et IIe siècle soit passé à côté de ces références d'autant qu'il pouvait les trouver s'il avait pris la peine de lire la traduction grecque de la Bible, la Septante, réalisé à Alexandrie par la dynastie macédonienne des Lagides au IIe siècle av. J. – C.

     

    La fête de l'Ascension s'établit au IVe siècle, elle était commémorée à l'occasion de la Pentecôte, qui célèbre la venue du Saint-Esprit. À l'époque, les Chrétiens participent à une procession à Jérusalem, vers le Mont des Oliviers, où fut arrêté le Christ. C'est le cas en France où la fête de l'Ascension est parfois fêtée simultanément avec la Pentecôte jusqu'au Ve siècle. En effet, c'est le pape Léon Ier (440-461) qui fixa la célébration 40 jours après Pâques, sans doute dans l'intention de faire le pendant aux quarante jours du Carême, qui correspond à la retraite du Jésus dans le désert. Elle est depuis lors célébrée dans les Églises d'Orient et d'Occident.

     

    À partir de 511, elle est précédée en Europe par les trois jours des Rogations, devenus facultatifs dans le culte catholique après le concile Vatican II. À Rome, au Moyen Âge, l'Ascension s'accompagnait de deux processions Celle où le pape se rendait à la basilique du Latran pour célébrer la messe puis celle où il repartait vers un sanctuaire hors des murs de la ville. À Venise, la célébration de l'Ascension s'accompagnait jusqu'au XVIIIe siècle de la sortie du célèbre bateau des Doges le Bucentaure, une tradition représentée à plusieurs reprises par le peintre Canaletto.

     

    L'Ascension est aussi un thème central de l'iconographie chrétienne, qui remonte au Ve siècle.  Une première représentation de l'Ascension, qui perdurera jusqu'au XIe siècle dans le monde occidental, figure une silhouette du Christ de profil qui gravit le mont des Oliviers et saisit la main de Dieu, surgie d'un nuage pour l'élever au Ciel. Les apôtres, rassemblés au pied de la colline, observent la scène.

     

    Sous l'Ancien Régime, en France, l'Ascension est chômée, comme Pâques, Noël ou les fêtes patronales. Les fêtes chrétiennes rythment alors la vie des villes et des campagnes. On ne peut donc s'étonner que dans le monde chrétien d'Europe, la fascination populaire pour les représentations visuelles et théâtrales a fait de l'Ascension un motif de prédilection dans nombre de manifestations rituelles, notamment dans les mystères médiévaux Les processions de la période de Pâque imitaient aussi le chemin que Jésus avait effectué avec ses apôtres jusqu'au mont des Oliviers. Parfois, un crucifix ou une statue du Christ ressuscité étaient élevés par une ouverture ménagée dans le toit de l'église.

    La Révolution française tentera – sans succès - de les remplacer par de nouvelles célébrations laïques. Le 24 octobre 1793, la  Convention adopte le  calendrier républicain en remplacement du calendrier grégorien, substituant, comme ère, à la naissance du Christ la date du 22 septembre 1792, premier jour de la République, et éliminant le dimanche au profit du « décadi ». Une fête de la Raison est organisée à Notre-Dame, décrétée Temple de la Raison, et le 7 mai 1794, la Convention instaure en réaction le culte de l'Être suprême. Ce qui avait pour but de mettre fin à la tentative de déchristianisation révolutionnaire est rapidement vouée à l'échec avec la chute de Robespierre le 9 thermidor (28 juillet 1794).

     

    Grâce au Concordat signé entre Bonaparte et le pape Pie VII, en 1801, l'Ascension redevient l'une des quatre fêtes légalement chômées, avec Noël, l'Assomption (montée de la Vierge Marie aux Cieux) et la Toussaint (fête des saints). On parle alors de « fêtes d'obligation ». Malgré la séparation de l'Église et de l'État de 1905, ces quatre dates demeurent chômées dans l'ensemble de l'Hexagone, l'Alsace et la Moselle la célèbrent également, tandis que la Saint-Etienne du 26 décembre et le Vendredi Saint ne sont chômés que dans les trois départements de l'est de la France.

     

    Dans la liturgie occidentale, la messe de l'Ascension est marquée par l'extinction, après la lecture de l'Évangile, du cierge pascal allumé le jour de Pâques Ce geste symbolise le retrait du Christ de la Terre ; il exprime une séparation et pourrait dénoter une certaine tristesse. Pourtant, toute la liturgie du temps de dix jours qui sépare l'Ascension de la Pentecôte est marquée par la joie du triomphe final du Christ ressuscité.

    Le thème du Christ-Roi se trouve ainsi au cœur de la fête de l'Ascension. Sur le plan de l'interprétation théologique, l'Ascension est le dernier acte de rédemption du Christ, une montée vers le Père annonçant pour tous ses fidèles une participation à la divinité.

     

    J’espère que ce petit article vous aura plein de choses sur le Jeudi de l’Ascension, qui ne se résume pas qu’à un pont toutefois fort bien venu pour prendre un repos bien mérité. Et je tiens encore à vous souhaitez à toutes et à tous une très bon et joyeux Jeudi de l’Ascension ! 

     


  • Commentaires

    1
    Dimanche 21 Juillet à 19:00

    freyr1978,

     

    C'est vrai que le récit de l'Ascension a eu de nombreuses inspirations dans l'Ancien Testament, dans la littérature apocalyptique juive, mais aussi dans la littérature païenne. Si on regarde de plus près le récit de Luc, il ressemble à celui de Matthieu d'envoi en mission des disciples, sans l'élévation dans le ciel selon le modèle d’Hénoch ou d’Élie. Le plus intéressant est le fait que Jésus envoie les disciples au sein de l'Empire romain afin d'augmenter le nombre de ses disciples contre l'impérialisme romain avec pour but de le renverser sans pour autant utiliser la violence, mais par des actes de protestation, de contestation et de soutien des mouvements sociaux de l'époque.

     

    C'est vrai que la fête est très récente vu qu'elle n'est connue qu'à partir du IVe siècle, et qu'à partir du Moyen-âge, elle devint une pratique festive qui  rythme alors la vie des villes et des campagnes, et qui sera gardée comme jour fériée en 1801.

     

    Merci pour ce bel article, les images sont magnifiques.

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